12 bonnes façons de ne pas lever de fonds

Alors que la saison automnale des levées de fonds bat son plein (nous sommes entre la fin de la période ISF et la fin de la période « défiscalisation de l’IR ») et qu’on ne devrait pas tarder à avoir quelques annonces dans les prochaines semaines, voilà mes quelques conseils pour ne pas lever d’argent. A bon entendeur…

  • Spammez les investisseurs. Reprenez un fichier de contacts d’un autre entrepreneurs, et balancez des mails en rafale, sans intro réseau, sans prendre le temps de vous demander si l’investisseur est le bon pour votre projet. Ce faisant, vous rajoutez un peu de boulot à toute la chaîne, c’est bien fait pour eux, na ! C’est bien connu, en marketing direct c’est le volume qui compte !

 

  • Croyez que ça va être facile. C’est vrai, tout le monde dit qu’il y a plein d’argent en ce moment. Les valos s’affolent. C’est la bulle ! Youpie, voilà qui va vous faciliter la vie, quelques pitchs et voilà, vous l’avez votre chèque. Et bien sûr, ça ne va pas prendre – pourquoi faire comme tout le monde – entre 4 et 8 mois pour lever !

 

  • Présentez un projet encore sur papier. De toute façon vous avez l’idée du siècle, une super étude de marché, y’a plus qu’à dépenser un peu d’argent dans la comm’ et faire un buzz ! Mais il faut aller vite, et c’est maintenant ou jamais. Pas le temps donc d’attendre, et par exemple de faire un peu de customer development, de réaliser une maquette ou un MVP, d’avoir un premier client, de bien bosser son modèle économique

 

 

  • Soyez trop nombreux, ou mal assortis, ou trop esseulé. Des stratégies intéressantes pour surtout ne pas prendre en compte que les investisseurs prennent leur décision à 50% sur l’équipe. Donc soit vous êtes super nombreux (gage quasi certain d’engueulade au-delà de 4 associés) – bonus supplémentaire si vous avez *tous* les mêmes compétences – soit tout seul, avec un projet très gros, demandant plein de compétences. Double bonus si vous n’avez pas vraiment tiré au clair comment vous répartir le capital de départ.

 

  • Arrivez après la bataille. Faites en sorte qu’à peu près 34 projets similaires au vôtre soient déjà passés dans le deal-flow des investisseurs, et si possible au moment où 3 ou 4 ont déjà annoncé leur levée de fonds ! Possibilité de bonus si SAI ou Techcrunch ou Frenchweb ont pondu un article annonçant une bulle dans ce secteur.

 

  • Ne montrez pas comment vous allez vous faire racheter. Bien sûr, votre plan est ambitieux et ça va cartonner. Mais ne soyez pas trop prévoyant et ne montrez pas comment, dans 5 à 8 ans, quelqu’un pourrait avoir intérêt à vous acheter pour compléter son offre. Ah, sinon, annoncez une entrée en bourse, c’est comme la licorne, tout le monde a envie d’y croire, surtout les investisseurs qui sont tous de doux rêveurs pas tout à fait sortis de l’enfance.

 

  • Soyez trop gourmand. Vous êtes très fort, votre projet génial. Et ça, ça vaut bien 3-4 millions d’euros, même pré-revenus. Demandez donc énormément d’argent, et foncez au PMU dire que vous êtes – sur le papier – millionnaire. D’ailleurs, achetez-en un, de millionnaire, tant que vous êtes au PMU.

 

  • Pipeautez un beau business-plan. Téléchargez le premier e-book venu, faites briller les cellules A1 à BZ66 dans Excel, bref soyez un bon élève, et surtout ne perdez pas trop de temps à aller renifler le marché et trouver un premier client. Si ça marche sur le papier, c’est bien suffisant. Bonus : pas de démo, please, pourquoi mettre les mains dans le cambouis ?

 

  • Ne soyez pas au courant de la concurrence. C’est tellement mieux de laisser l’investisseur avoir l’air intelligent lorsqu’il vous cite un concurrent que vous n’aviez pas identifié ! Faites donc un beau petit graphique, avec vous en haut à droite (astuce : tirez les critères à placer sur les axes x et y au hasard, remplissez ensuite). Solution alternative qui marche bien aussi : dites qu’il n’y a pas du tout de concurrence.

 

  • N’ayez surtout aucune idée des métriques importantes. Un business peut en général se résumer à une dizaine de chiffres clés, qui montrent tout votre modèle et surtout ce que vous en avez compris. Mais pas pour vous : les chiffres c’est bon pour le comptable ; vous, vous faites du business et de la strat’, que diantre ! Au mieux, sortez deux-trois banalités qui marcheraient dans n’importe quel business (ou sinon, votre nombre de followers et de fans).

 

  • Restez trèèèèèèèèès longtemps sur le marché. Une bonne levée de fond / phase de bêta, dans votre cas, va durer bien quelques dizaines de mois. Courrez un peu partout, racontez toujours la même histoire, dites « oui, oui, ça avance » avec une voix un peu grave, bref, servez un peu de bullshit à tout le monde. Au bout d’un moment, c’est sûr, ça paiera… Dire que certains limitent leur plaisir en cherchant à mettre tous les atouts de leur côté avant de se lancer et « compacter » la levée en le moins de temps possible…

 

  • Ne faites preuve d’aucune écoute. C’est le conseil ultime. Pitchez, d’un air sûr et vainqueur, votre idée. Si votre interlocuteur n’a pas compris / oppose un argument, c’est que : 1. ce n’est pas un investisseur pour vous 2. il est jaloux 3. il n’a vraiment rien compris 4. vous décidez de ne plus jamais parler à quelqu’un qui porte de grosses lunettes noires en plastique 5. ça vous renforce dans votre décision de continuer à pousser toujours dans la même sens 6. ils se sont donné le mot ou quoi ? c’est le 5ème cette semaine qui dit ça… quel manque de personnalité !

Et vous, votre conseil pour ne pas lever de fonds ?
N’hésitez pas à participer à la discussion dans les commentaires, c’est tout l’intérêt d’un blog 😉

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  1. Article très intéressant, merci. En accord avec le « Soyez trop gourmand » je pense aussi qu’être trop confiant (Être confiant est à mon sens nécessaire, mais il faut toujours garder un réserve, à mon avis) pourrais être un frein. Simple avis personnel.

  2. C’est globalement ça de mon point de vue…

    Un ajustement néanmoins. Tu dis « les investisseurs prennent leur décision à 50% sur l’équipe ». Il faut revoir ton pourcentage, c’est plus de 80%.

    Un excellent projet avec une mauvaise équipe ne passera jamais car il n’a aucune chance d’aboutir.
    Un projet moyen avec une bonne équipe aura toute ses chances.

    Ce qui fait qu’un projet réussi, c’est la capacité et la volonté farouche de l’équipe de le porter. La création, c’est une vie de chien pendant quelques années et il faut être apte à supporter cette vie. A l’intelligence, au savoir-faire, s’ajoutent la volonté, le courage, l’abnégation, …

    Pour ma part, c’est 95% sur l’équipe : détecter les vrais entrepreneurs est primordial.

  3. Haha excellent :-)

    Rien à ajouter, c’est parfait !

  4. Globalement d’accord, seule remarque: bâtir pour vendre, c’est batir pour échouer, comme l’évoque 37signals dans rework. Je ne mettrais donc pas trop l’accent sur la revente rapide, même si c’est un point à aborder.

    • D’accord avec toi Décébal, on ne crée pas un service dans l’optique de le vendre,
      par contre c’est une question à se poser car les investisseurs vont se la poser car ils ont besoin d’une porte de sortie à un moyen ou un autre …

    • Tu fais une confusion. Ce n’est pas bâtir pour vendre. Comme lorsqu’on contracte un emprunt, on programme son remboursement. Pour les business angels, entrant dans le capital, ils ne créent pas de dettes mais n’ont pas vocation à rester éternellement. Pour reprendre ton exemple, ils sont les étais qu’on peut mettre dans une construction. Lorsque la construction devient solide, on doit enlever les étais. Il est dès lors utile de penser à cette étape dès le départ.

  5. je pense que guilhem parlait plutot d’exit de maniere generale plutot que vendre. c’est bien entendu ce qu’un VC recherche, il va pas s’endormir avec vos parts ou les passer a son petit-fils donc oui, dans le cas ou une startup pitch un VC (pas forcement un angel) il est dans l’optique de revendre ou aller ipo.
    Sinon, je pense que c’est un bonne liste mais elle est tres longue cette liste ya enormement de facons de se planter. Rien que sur la facon de se presenter lors du premier rdv ou on arrive avec le My_Exec_Summary.doc qu’on a fait Save As…ppt magnifique!

  6. Bonjour,

    Pourquoi être négatif systématiquement.:-)
    Il y a une treizième bonne raison de ne pas lever de fond : l’Amour.
    « Tomber amoureux de son concept »
    Pour finir avec une note d’optimiste je dirais que la meilleure raison c’est d’arriver à s’autofinancer avec ses premiers clients.

  7. Je rajouterai : Ne misez que sur votre classement dans Alexa !

    – le produit ? il est top, regardez notre classement sur Alexa !

    – le business model ? on est bien classés sur Alexa !

    – les concurrents ? derrière nous sur Alexa !

  8. C’est un bon résumé :)
    Je me permet juste de rajouter « Faites en sorte que les investisseurs ne comprennent toujours rien à votre business au bout de 10mn ».
    Je pense qu’Alain sera d’accord avec moi;)

  9. C’est super résumé et super rigollot 😀

  10. Excellent ! je pense qu’on doit avoir tout juste;=) …

  11. Se présenter en Tong et se montrer toujours très optimiste.

  12. Et la 13ème : indiquez aux investisseurs que le business model a été testé « au black » et que par conséquent le prévisionnel tiens la route !!! :s
    véritable retour d’un entrepreneur quant à mes doutes sur son BP!
    c’est sur que ça rassure !

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