Est-ce la fin des grandes entreprises ?

Ou en tout cas le début de la fin ?

A voir la palanquée de jeunes qui souhaitent se diriger vers la création d’entreprise, rejoindre une startup ou travailler en PME, et avec le flot sans cesse grandissant de « déçus de la grosse boîte » qui souhaitent eux aussi une autre aventure professionnelle.. je me dis que la question mérite d’être posée.

En fait, ce n’est pas que les grandes entreprises en elles-mêmes vont disparaître, il y aura toujours bien sûr des entreprises importantes par la taille, et d’ailleurs celles qui le sont aujourd’hui ont quand même de grande chances de le rester. Non, la question est plutôt ailleurs : comment les grandes entreprises doivent-elles évoluer aujourd’hui pour exister encore demain ?

Et de ce que je vois (même si mon point de vue est forcément biaisé), je pense que la solution consiste à intégrer plus d’entrepreneurs dans ces mêmes entreprises. Même si cela semble un peu incohérent et antinomique… il y a en fait plein de bonnes raisons à cela :

  • les grandes entreprises croulent sous leur propre poids, et ont cruellement besoin de devenir plus agiles. Cela signifie qu’elles doivent lancer, en interne, des startups bien plus rapides, ou à minima instiller l’esprit entrepreneurial chez leurs troupes

 

  • les grandes entreprises savent innover, au travers de grands plans d’investissements et de R&D, mais ne savent pas réinventer leurs modèles (d’organisation, économiques, de motivation des troupes, …), sont très lentes à saisir l’air du temps, et ne mettent pas cette capacité d’innovation dans les mains de chacun de leurs employés, de manière quotidienne. Avoir des entrepreneurs, qui bouleversent le statut-quo, en interne, et donc accepter de se faire challenger, c’est aussi l’assurance d’avoir une indiscipline productive (tiens, voilà un bon concept – retweetez-le !)

 

  • il y a un vrai ras-le-bol des jeunes générations, qui ont l’impression d’être des petites pièces interchangeables d’un gros rouage qui de toute façon les écrasera à la première occasion. Il faut que les salariés puissent se réapproprier leur job, sortir du « tout politique », s’écarter des process, porter leurs objectifs (en adéquation avec ceux de l’entreprise, évidemment), mieux choisir leurs équipes… Et on n’est là pas très loin de la notion d’intrapreneur…

 

  • Si les grandes entreprises veulent s’assurer un avenir, il leur faut attirer les bons talents… et les talents de demain font partie soit de la génération Y, soit des digital natives, et attendent bien autre chose que leurs aînés. Et notamment les choses dont on a parlé juste ci-dessus… Si les RH ne s’y adaptent pas, ils verront leurs troupes déserter à la moindre divergence d’intérêt.

On note déjà d’ailleurs une avancée très forte des grandes entreprises vers l’intégration de l’entrepreneuriat (au sens large, en tant que compétence d’une personne, sous entendue la capacité à faire bouger les choses et porter des projets). Certaines boîtes lancent des incubateurs internes, mènent des programmes pour pousser à la créativité business, demandent à leurs jeunes recrues de les aider à se réinventer, montent des fonds « corporate » d’investissement pour se rapprocher des startups, accueillent des startups dans les locaux (un exemple très proche à Neuilly par exemple), un intérêt grandissant des grandes entreprises pour tous les cours et autres manifestations liées à l’entrepreneuriat, une vraie valorisation des expériences entrepreneuriales (y compris le sacro-saint « échec »)…

Bref, les choses changent, mais clairement pas assez vite dans toutes les grandes entreprises… Avis donc à ces messieurs, s’ils veulent en parler 😉

En attendant, partagez avec nous dans les commentaires (c’est ça qui fait que ce blog a un peu d’intérêt, alors passez outre votre timidité et prenez la parole !) vos expériences relatives aux grandes entreprises et pourquoi vous êtes bien dedans ou au contraire vous les avez fuies…

 

 

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  1. Super article, très pertinent. Pour en fréquenter quelques-uns, beaucoup d’entrepreneurs cherchent tout simplement à « donner du sens » à ce qu’ils font au quotidien. Quitte à gagner moins de sous (et c’est peu dire…!) et à travailler beaucoup plus (là aussi, c’est peu dire…)
    Et comme évoqué dans l’article, les grandes entreprises, à quelques exceptions près, peinent à donner un sens à leur action…

  2. Pour moi tu as parfaitement résumé la situation.

    Je fini mon préavis dans un grand groupe pour tenter ma chance tout seul! Je ne supporte plus la castration de ne pas pouvoir travailler comme je l’entends, avec des outils et des méthodes en phase avec notre ère. On a plus de 10 ans de retard par rapport au web… Il nous est impossible de faire bouger quoi que ce soit…

    Pour moi, le principal problème des grosses boîtes que tu as évoqué : l’agilité! Toute prise de décision comporte une phase incompressible de plusieurs semaines. Ensuite, la remise en question est impossible. Les grandes boîtes estiment qu’elles ont tout à perdre à essayer de changer quoi que ce soit. Au bilan, elles campent et deviennent de moins en moins performantes. Ca tient… puis un jour ça casse, et là on résout le problème à coup de grosses restructurations. Les salariés sont en général les premiers perdants.

    Les ressources qui arrivent avec une richesse naturellement (de par une expérience différente des autres) sont contraintes de se mettre dans le moule. En général, on s’acharne un moment, puis on se met en mode pilote automatique. Dans ce cas, soit on attend la retraite, soit on s’en va! J’ai choisi le second choix!

    Dans tous les cas je serais gagnant. J’aurais essayé et j’aurais découvert un élément fondamental pour moi en ce moment : suis-je bien fais pour entreprendre? :-)

  3. J’ai passé beaucoup de temps à recruter différents profils (ingé, commerciaux…) pour une start-up. Je peux vous assurer que trouver des jeunes (ou moins jeunes d’ailleurs) profils motivés par l’aventure PME au sens large du terme est loin d’être une tâche facile.

    Je suis donc beaucoup plus nuancé que toi sur le nombre de volontaires à la prise de risque. Car oui intégrer une petite structure constitue un risque.
    Certes il y a beaucoup de candidats à l’aventure, peut être de plus en plus (effet de mode ?), mais en proportion cela reste infime.

  4. Je ne partage pas ton point de vue, j’ai 18 ans et la majorité des jeunes que je connais souhaite rejoindre de grands groupes qui offrent une certaine sécurité, des possibilités d’évolutions et beaucoup d’expériences internationales, au final très peu d’entrepreneurs en herbe..malheureusement.

  5. Plutôt d’accord avec JS.
    Je viens d’une école d’ingénieur très ouverte sur l’extérieur, qui favorise l’initiative et la gestion de projets multi-dimensionnels (3 éléments qui me semblent essentiels pour un entrepreneur) et pourtant, il y a très peu d’étudiants (2 ou 3 % peut être) qui se lancent dans l’entrepreneuriat… pire, il n’y en a pas beaucoup plus qui ambitionnent de travailler dans des TPE / PME. Non, clairement, l’ambition est de travailler dans une grande entreprise, connue et si possible cool (Decathlon, Apple, etc…). C’est étonnant, d’autant plus que lorsqu’on les interroge, ils se disent intéressés par l’entrepreneuriat… mais de là à franchir le pas…
    Peut être les toute dernières générations de diplômés, qui déboulent dans un marché de l’emploi dévasté, se sentent plus prêts à supporter leur propre projet… faute de mieux… ou alors ils l’envisagent plus facilement car dès le départ leurs perspectives d’emploi sont faibles.
    N’y a-t-il pas un corrélation entre l’entrepreneuriat et le taux d’activité ?

  6. Excellent article très clairvoyant. Commentaire très juste. Désolé, ça ne fait pas tellement avancer le débat mais je suis fatigué…

  7. l’entrepreneuriat ou freelancing (qui convergent) restent bien sur un choix minoritaire (et est aussi question de caractère) mais je suis persuadé qu’il tend à gagner en importance. Nous vivons une révolution technologique extraordinaire en même temps qu’un crise économique (et politique?) majeure qui pousse les individus à repenser leurs parcours.

    Les gens sont capables de s’interconnecter facilement et efficacement. La structure productive s’atomise. Les modes de socialisation se transforment, les mentalités évoluent naturellement. Les entreprises doivent revoir leurs relations avec les consommateurs autant qu’avec leurs salariés. La représentation du succès est en train de changer http://ow.ly/4zIvi et on commence à assister au déversement d’un certain nombre de talents des grands entreprises aux petites structures.

    Les petits jeunes qui rêvent de sécurité dans des grosses boites en connaitrons bien vite le prix (pour une prestation fort dégradée).

  8. Bonjour Guilhem,

    Cela faisait longtemps que je n’avais pas commenté sur ton blog. Même si je me considère encore jeune, à 36 ans je suis un vieux. Je suis tombé dans l’entrepreneuriat dès la fin de mes études. Plus le temps avance plus je me dis que je ne suis pas fait pour le salariat, même le Pôle Emploi en est de plus en plus convaincu. La garantie de la stabilité n’existe plus, donc pourquoi ne pas choisir l’entrepreneuriat et gérer soi-même comme on veut et surtout comme on peut.

    La réponse à la question de l’article est très clair : il faut un changement structurel. La littérature est abondante dans ce domaine, notamment sur le rôle central que peut jouer les RH. La ligne éditoriale de mon propre blog d’ailleurs est basée sur ces thématiques.

  9. Est ce la fin des grandes entreprise ? Non, je ne pense pas non plus (à moins que tout ne s’écroule et qu’on se retrouve à poils, à vivre d’amour et d’eau fraîche !). La question mérite quand même d’être posé : Comment les grandes entreprises doivent-elles évoluer aujourd’hui pour exister encore demain ? En effet, dans les conditions actuelles, je suis curieux de savoir si les entreprises réussiront à attirer suffisamment de cerveaux pour manager leurs énormes machines… Le fait est que leur intérêt premier est de faire croître le capital financier et qu’elles tendent à les alléger. Elles ont déjà tellement externalisé, pourquoi s’arrêteraient-elles maintenant ? Pourquoi ne pas collaborer avec un écho système de petites entreprise et leur confier de gros projets, ou même carrément stratégique! D’ailleurs, ici (1) et la (2), j’entends parler d’avantage de collaboration entre les grosses entreprises et les Start up. Intégrer des entrepreneurs dans ces entreprises ? Idéalement oui ! Encore faut-il que ces mêmes entreprises sachent se réinventer : parceque le chemin est long avant qu’on ait envie d’y retravailler (c’est mon point de vu personnel en tout cas !). Sur ce point là, on va peut être encore regarder du côté de Google, et le virage stratégique récemment entrepris par Sergey Brin qui semble rêver d’un retour à un management de start-up.

    Personnellement, je m’intéresse moins à l’avenir des grosses entreprise qu’à celui des individus ; j’aime imaginer que l’Internet de demain offrira à tous les entrepreneurs des moyens de collaboration capable de rivaliser avec le management des grosses entreprises. Internet nous permettrait-il de recréer une économie plus humaine, de redevenir des individus indépendants ?

    Et pendant qu’on y est…, avez vous lu cette article publié sur Le nouvel économiste : La fin des préjugés : esprit startup vs esprit grand groupe (3)?

    Vincent

    (1) http://atelier.net/articles/grandes-entreprises-ont-gagner-collaborer-incubateurs
    (2)http://www.les-bosseurs.fr/tribune/ressources/logiciel/reseaux-communaute/inops-valorise-les-pme-innovantes-aupres-des-grands-g
    (3) http://www.lenouveleconomiste.fr/la-fin-des-prejuges-1905/

    (J’en profite pour glisser que nous sommes en train de monter http://www.les-bosseurs.fr, un portail d’agrégation d’information pour les entrepreneurs (à la sauce curator ?) sur lequel on diffuse des liens vers des articles pertinents (comme celui-ci) qu’on souhaite pérenniser en les intégrant dans des dossiers (un peu comme wikipédia). Le site est collaboratif : n’importe qui peut s’inscrire et poster un article, une vidéo… ou contribuer à la rédaction des dossiers.)

    • Merci Vincent pour ce très chouette commentaire, qui est complètement en phase avec ma pensée (au-delà du titre un peu provoc’) : comment les grandes entreprises peuvent-elles intégrer plus de comportements entrepreneuriaux chez elles pour se réinventer et continuer à progresser…

      Super le doc (3) ! Merci de l’avoir pointé !

  10. Une grande entreprise n’est pas une startup et inversement. Mais la compréhension de l’un et l’autre et leur collaboration semble indispensable au bon équilibre de cet écosystème. Par ailleurs, les grandes entreprises devraient soutenir les jeunes projets et leurs équipes. http://www.2lr.org/?p=896

  11. Un eceuil a éviter avec les start-up internes c’est qu’elle considèrent leur société mère comme un marché. Elle de coupent de la réalité du « vrai » marche externe, elles concurrencent et perturbent les équipes et systèmes internes.
    Donc d’accord avec toi qu’il faut faire rentrer l’innovation mais attention au syndrome de « tout est mieux dans une starr-up » la seule différence c’est une prise de risque plus forte et un niveau de contrôle moins élevé.

  12. C’est la grande question des juniors se lançant dans la vie active!
    Se faire une expérience, se structurer et profiter des avantages financiers des grandes entreprises avec toute la lourdeur d’organisation que cela induit et vivre la vraie aventure bien plus excitante et challenge de travailler dans une start-up, avec moins bien de confort il faut l’avouer.
    Cela dépend de la personnalité.
    Complètement d’accord pour instaurer une logique d’intra-entrepreneurs dans ses grosses structures sclérosées, un peu d’air!!

  13. Article intéressant!

    En effet nous sommes peut-être à la fin d’un cycle, là où les grands groupes ont mangé toutes les PME, mais où renaissent des TPE très innovantes.

    Si les jeunes préfèrent les grands groupes, c’est parce qu’elles semblent donner confiance, permettre l’évolution de carrière, avec un pseudo-reve d’épanouissement. Les TPE, elles, obligent à vivre d’amour du travail, d’eau fraiche, et surtout de pain sec… Mais ce sont elles qui procureront le sentiment de liberté!

  14. J’en suis à une énièmeème expérience dans une grande boîte leader de son secteur, historique, franchouillarde, avec une belle vitrine mais de plus en plus vide de sens et pleine d’incohérences, à la GPEC désastreuse, et je ne parle pas pas de mes stages conventionnés. J’ai traversé 8 entreprises au total depuis 10 ans, et c’est finalement toujours le même constat ;: ON MARCHE SUR LA TÊTE !!!

    Bref, ma proposition est la suivante : ce qui fait la force d’une grande boîte, c’est sa taille, sa puissance une fois tout le monde (ou un grand pourcentage) mobilisé. Ce qui fait sa faiblesse, c’est sa réactivité. La solution est dans la délégation et la confiance qu’accepteraient d’accorder les directeurs ou managers de deuxième ligne, et non pas de concentrer le pouvoir et les informations => Il faudrait voir les grandes boîtes comme une interférence positive de multiples petites startups !

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