On prête volontiers tout un tas de super qualités à l’entrepreneur, qui est un peu devenu un héros des temps modernes. Les Pierre Kosciusko-Morizet, Jacques-Antoine Granjon, les frères Rosemblum, Oriane Garcia, Catherine Barba… tous mériteraient presque d’avoir des produits dérivés à leur effigie.
Si l’on écoute un peu les journalistes (ou, pire, les blogueurs), l’entrepreneur serait pétri de dons : visionnaire, travailleur, porteur de valeurs, concret, humain, tourné vers l’action. Un peu l’inverse d’un grand méchant patron, en quelque sorte. Pourtant, à dès qu’on gratte un peu, on se rend compte que l’on est très loin de la vérité. Et la vérité, elle n’est pas belle à voir : en fait, l’entrepreneur est un inconscient. Mais que vient donc faire Freud dans cette histoire ?
Un trait de caractère nécessaire…
Être inconscient, c’est ne pas se rendre compte de ses actes, ne pas prendre la pleine mesure de ce que l’on fait. Et il faut bien avouer que de l’inconscience, il en faut pour se lancer dans l’aventure de la création d’entreprise. Qui, en effet, quitterait une situation douillette, un emploi à vie, un bon salaire ou un début de carrière prometteuse pour repartir de zéro, avec au moins deux à trois années à souffrir sans contrepartie financière ? Ce serait donc alors dans une sorte d’état d’ébriété économique que l’entrepreneur en herbe serait au moment de se lancer, se shootant à l’adrénaline provoquée par l’envie de se lancer et à la liberté promise par ce statut sacrosaint de créateur d’entreprise.
Le domaine du rêve
Si l’inconscience traduit une sorte de fuite de la réalité, c’est aussi le lieu où se forment les rêves. Et finalement, c’est peut-être ça la caractéristique des entrepreneurs : ils rêvent. Chacun formule une version idéale de ce que pourrait être son entreprise, si tout marchait comme sur des roulettes. Chacun a une mission secrète (de changer le monde ou une partie) ancrée profondément en lui. Chacun se sent poussé par un mouvement irrépressible (je dis souvent que créer sa boîte, c’est comme une « envie de pisser », ça ne peut pas attendre).
Schizophrène ?
L’inconscience serait donc un trait de caractère partagé entre les entrepreneurs. En tout cas au moins au début, car passée l’insouciance des premiers mois où tout semble possible, le tout jeune patron se voit vite confronté à la dure réalité de la vie d’une entreprise : difficulté à comprendre son marché, clients prospects à convaincre, produits à finaliser, besoin de se faire connaître sans moyens importants… La frustration de l’entrepreneur provient de cette dichotomie entre ses rêves et la difficulté à les mettre en œuvre.
Et pour réussir, c’est bien ça. Être totalement inconscient, mais l’être de manière très appliquée et sérieuse. Voilà, c’est ça, l’entrepreneur est un inconscient professionnel.
Freud n’a pas fini d’avoir du boulot.
[ce thème est bien mieux traité chez les deux inconscients que sont le Tribulateur et le Poupardin, dans le cadre de nos posts croisés du vendredi !]
9 octobre 2009 at 12:21
« se shooter à l’adrénaline » j’aime beaucoup 😉
9 octobre 2009 at 12:28
Si tu commences à parler de Freud, alors, je m’incline….
9 octobre 2009 at 12:43
Ne t’incline pas trop tout de même, avec l’adrénaline, on ne sait jamais…
😉
9 octobre 2009 at 20:05
C’est marrant, tu es tombé dans le panneau!
15 octobre 2009 at 17:15
très bonne approche du caractère de l’entrepreneur, au passage je rajouterais que » Du rêve né l’Ambition… »
27 juillet 2012 at 9:26
Je rajouterais que les entrepreneurs sont également les rois de la « positive attitude » ! Penser positif et rester positif malgré les risques et les embûches qu’ils vont rencontrer dans leur progrès.
Ce n’est pas forcément de l’inconscience, mais plutôt la sensation que « çà va le faire », une espèce de foi en soi, et en son projet finalement ! Et ils ont raison, car la part psychologique est très importante dans la route du succès. Ceux qui réussissent sont souvent ceux qui ont su avant tout persévérer et rebondir, car ce ne sont pas les occasions qui manquent pour abandonner à la moindre difficulté…
Vive l’entrepreneuriat
17 août 2014 at 18:16
Très bonne approche sur l’esprit d’un entrepreneur. A vrai dire, je trouve que c’est surtout un très grand paradoxe chez lui : d’un coté il doit être capable de créer dans sa réalité, mais en même temps de rêver pour toujours innover.