Entreprendre jeune / Créer une entreprise après (ou pendant !) ses études…

Un de mes chevaux de bataille, c’est de débloquer l’esprit d’initiative des jeunes. Ce combat remonte à déjà plusieurs années, début 2004 exactement. J’étais alors un tout jeune entrepreneur, très naïf, et j’ai participé pour la première fois à un témoignage face à des étudiants en IUT. Je fais donc mon témoignage devant les 80 étudiantes et etudiants, plein de dynamisme et d’optimisme, puis je pose LA question qui m’a fait retomber durement sur terre : « qui parmi vous compte créer son entreprise, un jour ? ».

Un constat assez dur…

En fait, c’est plutôt la réponse, ou la non-réponse, qui m’a donné le coup de grâce. Personne. L’échange qui a suivi a été assez intéressant, et je l’ai poursuivi ensuite au cours de plus de 30 interventions. C’est ce qui m’a d’ailleurs donné envie de créer la bande-dessinée Lucy & Valentin… créent leur entreprise !, à destination des élèves de troisième. Plus on parlera tôt de création d’entreprise, mieux ce sera !

Mon retour en septembre dans le milieu estudiantin m’a permis de me rendre compte que le chemin à parcourir était encore long ! mais alors, pourquoi les jeunes ne considèrent toujours pas la création comme l’une des possibilités, pendant ou à l’issue de leurs études ?

On aurait en effet tendance à penser que les jeunes sont plus dynamiques, plus entreprenants, ont moins conscience des risques, n’ont pas le poids des habitudes et des normes sociales et seraient donc plus à-mêmes de se lancer dans l’aventure entrepreneuriale. Que nenni !

Quelques chiffres…

La France semble bouger et se doter d’un esprit entrepreneurial de plus en plus fort, ainsi plus de 50% de la population aimerait se mettre à son compte ou devenir patron. Pourtant, très peu le font (même si le statut d’autoentrepreneur pourrait changer la donne). Chez les jeunes, c’est encore pire, seuls 3 à 4% des étudiants envisagent créer pendant ou à l’issue de leurs études. Moins de 1% le font.

Une bonne remontée d’informations…

Au cours de mon expérience et de mes rencontres, j’ai pu mettre le doigt sur plusieurs des freins à la création d’entreprise chez les jeunes. La plupart peuvent connaître des réponses assez simple mais c’est un long travail d’évangélisation qu’il faut mener. Et d’action aussi.

J’ai pu récemment mettre à jour ma perception des choses, en organisant deux groupes « créativité » avec des étudiants, qui ont réfléchi librement pendant 2 heures au sujet de la création d’entreprise chez les jeunes. De nombreux freins sont ressortis, et j’ai gardé quelques citations assez marquantes, je vous les livre telles-quelles :

Crise cardiaque, aucune garantie, tout faire tout seul, devenir un loser, pas de clients, financement, tout perdre, suicide, être copié, problèmes avec les associés, perdre sa réputation, les partenaires vont tricher, pas facile de communiquer, laisser passer d’autres opportunités, attiser la jalousie, se faire virer de sa propre boite, ne plus avoir de vacances, …

Tous ces freins sont bien évidemment liés à la notion de risque perçu. Et comme tout risque il existe des moyens de le limiter, par sa propre action ou en s’appuyant sur l’extérieur. Pour chacun des freins j’essaie d’apporter quelques réponses… vous pouvez bien évidemment m’aider dans les commentaires.

Les grandes freins chez les jeunes… majoritairement faux !

Voilà donc le TOP5 des raisons de ne pas créer son entreprise, à disons moins de 25 ou 30 ans :

  • Je n’ai pas assez d’argent.
  • Je ne sais pas faire, je n’ai pas assez d’expérience.
  • Ca va être très dur physiquement et moralement.
  • Si j’échoue, ma carrière sera foutue.
  • Je ne peux pas parler de mon idée, on va me la piquer.

Et voici le TOP5 des réponses rapides à apporter :) je creuserai une autre fois, promis.

  • Argent. Pas besoin de beaucoup d’argent ! 70% des jeunes créateurs créent avec moins de 10000 euros (principalement dans les services et le commerce). La SARL ou la SAS à 1€ et l’autoentrepreneur sont là, en plus ! Et le propre de l’entrepreneur est bien de faire beaucoup avec très peu !
  • Expérience. Tout s’apprend, lorsque l’on crée. De toute manière il n’existe pas de formation « académique » à la création d’entreprise qui garantisse le succès, tout le mode a donc ses chances, avec du travail et de la volonté. Je me demande même si pour apprendre la création d’entreprise, il ne faut pas tout simplement créer.L’expérience peut s’obtenir différemment : en s’entourant de seniors conseils/tuteurs/mentors, en rencontrant des gens et les questionnant, avec des associés, en faisant, tout simplement…
  • Effort. Oui, créer est difficile, demande des sacrifices, c’est un sacerdoce, on ne va pas gagner très vite sa vie. Mais quel travail est aujourd’hui 100% satisfaisant ? L’entrepreneur ne recherche pas le confort, qui est le meilleur moyen de rester dans le statut-quo ! Alors oui, il faut se retrousser les manches et bosser dur. Mais le jeu en vaut la chandelle : liberté, sens, aventure humaine, et bien sur beaucoup plus grande probabilité de gain (et en tout cas de satisfaction personnelle). Ca demande un peu de sueur de changer le monde !
  • Carrière. Même un échec est positif, c’est dans l’adversité qu’on apprend. Et en ayant tenté, réussite ou non à la clé, on montre son autonomie, sa capacité à appréhender des problèmes compliqués, on développe plein de compétences, et surtout si l’on a appris de ses erreurs. J’ai bien rejoint, en position de force, un grand groupe comme Microsoft, après avoir vécu les deux issues ! Les grands (et petits) groupes recherchent des profils de gens qui en ont. Et puis, entre faire 2 ans de junior et vivre une vraie aventure pleine de sens… il sera bien temps d’être sérieux plus tard !
  • Espionnage. Ne pas parler de son idée est sûrement la meilleure manière de ne jamais réussir à la faire naître. Je saute au plafond dès que quelqu’un me dit : j’ai une idée géniale mais je ne peux pas en parler. Ahhhhhrggghghg ! C’est se couper tous les feedbacks possibles, s’empêcher de belles rencontres et être totalement dénué de bon sens que de croire ça. Tiens, ça me réchauffe d’aborder ce sujet :) Vous pouvez lire ici un article que j’ai fait il y a quelques temps sur l’impérieuse nécessisté de parler de son idée.

Conclusion : une situtation en amélioration ?

La situation semble noire, pourtant je suis méga optimiste. Les choses bougent. L’autoentrepreneur, les statut de Jeune Entreprise Universitaire (JEU), les incubateurs d’école de commerce (ou d’ingé), les cours de création d’entreprise, le retour en grâce des modèles d’entrepreneurs, la presse qui s’y intéresse de plus en plus, la quête de sens des jeunes qui ne veulent plus d’un système trop rigide et pas assez fun, toutes les actions de sensibilisation ou les concours, la SARL à 1€ et les lois Dutreil, CA BOUGE !

Je suis près à continuer d’user mes chaussures, mon bâton de pélerin et ma créativité jusqu’à ce que ce soit bien dans les esprits !

Développement des incubateurs.

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  1. Article intéressant qui me redonne envie d’écrire aussi sur ce genre de sujet :-)

    J’avais fait effectivement le même constat dans différentes écoles de commerce. Les citations montrent bien surtout la profonde méconnaissance de ce qu’est l’entrepreneuriat et le risque. Les étudiants retiennent alors tous ces « gros mots » que les médias et l’entourage (statistiquement peu d’entrepreneurs) partagent. Et, disons le aussi, beaucoup d’entrepreneurs eux-mêmes préfèrent s’attarder sur le poids des charges, le temps passé au bureau le dimanche sans voir sa famille et la santé qui en prend un coup plutôt que sur le plaisir d’entreprendre qui doit pourtant bien rester central.

    Bref, encore des gros changements de mentalité à mener mais, avec des évangélistes comme toi, on peut être confiant !

  2. Tout d’abord meilleurs voeux à tous et vive les entrepreneurs en 2009! :)

    Cet article est très intéressant et me rappelle beaucoup de souvenirs. En effet, je me suis lancé dans l’aventure entrepreunariale alors que je n’avais que 22 ans.

    On me ressortait les mêmes refrains pour me dissuader de me lancer dans cette aventure. Mais, au final, je me suis lancé et quelle sacré aventure!

    Ce qui m’a le plus marqué est l’enthousiasme des chefs d’entreprise aguerris qui vous rencontrent et qui vous soutiennent dans votre démarche. Petite phrase qui ressortait souvent: »Ca fait plaisir de voir des p’tits jeunes se lancer », « Vous avez du culot », « On n’a pas l’habitude de voir des jeunes comme vous ». C’est motivant de voir qu’on est capable d’intéresser des pros qui ont 20 ans de bouteille derrière eux.

    C’est sûr que la vie n’est pas des plus facile, mais comme le dit Guilhem, on ne cherche pas à devenir entrepreneur pour l’argent (dans un premier temps) mais pour l’aventure humaine: rencontrer des gens de tout horizon et de toute classe sociale, parcourir la France et aller en dehors des frontières, nouer des liens avec des partenaires…

    La culture de la gagne et de l’entreprise n’est pas encore inculquée dans nos chers lycées. On y cultive plutôt l’élitisme et le confort du CDI… Mais, je pense que les moeurs évoluent et le fait de pouvoir intervenir dans les lycée nous donne la chance de démontrer qu’être Entrepreneur, c’est tout sauf la misère.

    Succès ou échec, on en ressort toujours grandi et cette formation a été la meilleure que j’ai suivie. L’essentiel est toujours de rester positif et de savoir bien s’entourer. Des problèmes il y en aura toujours, mais les solutions sont toujours plus abondantes.

    Bravo Guilhem pour ta démarche pédagogue.

  3. MER-CI !

    Une analyse fort lucide, du point de vue jeune qui est le mien…

    Même constat que vous sur la peur du risque chez la très grande majorité de mes camarades. Et comme vous le dîtes, changer cette aversion du risque passe par une sensibilisation à la maîtrise du risque et par un démenti argumenté des innombrables « fausses idées », « fausses peurs » que la mentalité française traîne comme des casseroles.

    Je serais peut-être un poil moins optimiste sur le changement dans la création d’entreprise en France. Certes, les choses semblent bouger, mais le retard est encore énorme. Lorsque je vois ma génération apathique, apeurée, transie, je me dis que ce n’est pas gagné. Mais c’est pour ça qu’il faut des gens comme vous, n’est-ce pas ? :-)

    En ce qui me concerne, autant je rencontre des gens très encourageants, et constructifs, autant on voit encore trop souvent des personnes très négatives et cassantes inutilement. Il faut avoir le coeur bien accroché et le caractère bien trempé pour se lancer aujourd’hui, du moins c’est mon ressenti.

    En revanche, là où c’est encourageant, c’est qu’une fois que l’on a compris à qui s’adresser, l’aide est salvatrice et de qualité. Les interlocuteurs existent, et ils sont bons. Peut-être faudrait-il qu’ils soient plus visibles ?

    Enfin, je pense sincèrement que le système éducatif français ne pousse pas au développement de la créativité, surtout lorsqu’on le compare au système anglo-saxon par exemple. Cela s’approche plus de la scolastique que de l’éducation. Si l’on commençait par apprendre à apprendre aux jeunes, plutôt que de les gaver de connaissances théoriques, nous aurions peut-être plus d’initiatives entrepreunariales. Mais ça, c’est un tout autre débat, long et difficile…

    Au plaisir de vous lire !

  4. C’est dommage de systématiquement parler des écoles et jamais de la fac, elle n’a certes pas une image aussi glorieuse mais en terme de nombre d’étudiants difficile de l’ignorer.

    Sur ma promo de 20 élèves de master on est 3 sensibles à l’entrepreneuriat, pas trop mal.

    Et il faut avouer que les facs de Grenoble sont dynamique de ce côté grâce à la maison de l’entrepreneuriat qui communique sur le sujet (même si dans nos cursus on ne nous parle jamais d’entrepreneuriat, ce qui dans le domaine du web me semble impensable).

    La plupart des étudiants ne seront jamais entrepreneurs. Déjà il y a le risque et la peur de la surcharge du travail qui joue c’est clair.

    Mais à mon avis ce qui freine le plus mes camarades c’est qu’ils ne savent même pas quel métier exercer exactement (en master 2 ça devient inquiétant), et j’ai déjà vu le même comportement chez de nombreux étudiants, même d’école.

    L’intérêt pour le domaine puis la cristallisation d’une idée font parti des moteurs de l’entrepreneuriat. Si les étudiants ont du mal à cibler leur domaine, je vois mal comment pourrait surgir une idée.

  5. Très beau post merci et continue ça fait plaisir de voir des gens qui se bougent pour démocratiser la création et tordre le cou aux idées reçues.

  6. Hé bé, le sujet provoque des réactions encore plus intéressantes que mon article ! Makes my day !

    @Laurent Bazet : C’est vrai que lorsque l’on est entrepreneur, on aime bien parfois charger la barque et se faire un peu plaindre, on doit avoir un fond de Caliméro en soit :)

    @Philippe Kieu : Oui, c’est fou le nombre de gens, même proches de la retraite ou déjà retraités, qui sont prêts à donner un coup de main et transmettre un peu de leur expérience et de leur réseau. Surtout ceux qui ont été entrepreneurs eux-mêmes !

    @Kevin Palop : Merci ! Et c’est vrai qu’il y a toujours dans une génération des suiveurs et des leaders… Chacun son bonheur où il veut, le tout c’est de le trouver. Apprendre à apprendre est une très belle finalité !

    @eMeRiKa : dont acte, c’est ma faute, j’ai un biais naturel à plus parler des écoles, que je connais plus pour y être passé moi-même. Pour recentrer, c’est vrai que dans les universités aussi, ça bouge. L’association que j’avais fondée, l’AJEL, doit bien faire aujourd’hui plus de 50 interventions par an dans des facs, beaucoup plus qu’en école de commerce. Et de très beaux projets sortent de fac. Le lien avec le monde business est par contre peut-être là où le bât blesse. Ca et l’encadrement de proximité, je pense.

    @Thibaut : merci :) je rougis !

  7. J’ai commencé à bosser sur ma création d’entreprise en dernière année d’école (2007)

    Nous devons être 5 dans notre promo à avoir fait le choix de la création.

    Les freins ennoncés dans l’article sont bien réels… mais en regardant d’un peu plus près, ils ne doivent empêcher personne de goûter aux plaisirs de l’entrepreneuriat :

    – Se lever tous les matins pour créer du sens, rendre le monde meilleur

    – Rencontrer des gens vraiment géniaux

    – Vivre une aventure hors du commun

    J’ai laissé exprimer mon côté idéaliste. En d’autres termes, pour tous les étudiants soucieux de leur carrière, voici selon moi les bénéfices de la création d’entreprise :

    – Créer / booster son réseau (Peux être la chose la plus importante dans le monde de l’entreprise)

    – Etre chef d’entreprise plutôt que assistant junior de …

    – Emmagasiner 10x plus d’expérience en 10x moins de temps

    – Développer des compétences clées : Leadership, management d’équipes, communication, gestion

    La vie est courte, les rêves souvent nombreux. L’entrepreneuriat est la meilleure solution que j’ai trouvée pour réaliser les miens. Je vous le conseille donc.. jusqu’au jour où je trouverai un meilleur moyen..

  8. Est ce que les créateurs qui lisent ce blog et ce post plus particulièrement peuvent se présenter et présenter leur création ? Ca pourrait être marrant !
    Allez je commence :
    Thibaut Bayart 32 ans et j’ai créé Vendido http://www.vendido.fr sur le constat que vendre sur eBay est efficace mais c’est un vrai métier.
    Nous proposons :
    – aux sites de e-commerce et aux logisticiens de gérer leurs retours clients et autres litiges en les remettant en vente sur eBay
    – au distributeurs de vendre leurs fins de série courtes
    – aux marques d’animer leur « factory store » sur eBay
    Qui d’autres ?

  9. Philippe Kieu, 26 ans, quelques créa à mon actif:

    1) 2004: Exeast, société d’accompagnement à l’international, puis transition vers du trade/ négoce (Outillage, Cave à vins et cintres)

    2) 2006: Veillex.com, magazine sur le commerce international et création d’un réseau de professionnels du commerce international

    3) Depuis 2007, KMX, import/ distribution de Sextoys, avec la création d’une marque haut de gamme, suivi d’un concept commercial original.

  10. Hé les amis, on s’éloigne un peu du sujet :)

    Par contre super idée, je vais réfléchir à quelque chose de créatif pour mettre en avant des entrepreneurs sympa comme vous !

    Je vous propose de me dire si vous êtes intéressés en m’envoyant un mail à blog_at_guilhembertholet_point_com plus une petit pitch rapide en 3 lignes.

    Promis je lance un truc sympa d’ici peu. Et pour les chanceux, peut-être un entrepreneurview :)

  11. oui votre constat est bien vrai, les jeunes d’aujourd’hui sont frileux et refusent de prendre des risques et puis là avec la crise…. ca ne va pas aller en s’arrangeant.. c’est évident! aprés je vous rejoins dans le fait qu’il faut essayer de les pousser car à mon sens la meilleure période pour créer sa boite c’est bien à la sortie des études!

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