Vision vs. Quotidien

Monter une startup, ce n’est pas créer une entreprise « normale ». En effet, dans une entreprise classique, on ne vous demandera pas vraiment de défendre une vision. En effet, on parle ici de créer un commerce ou une entreprise de service, la plupart du temps, sur des métiers bien connus, maîtrisés, où finalement les facteurs clés de succès sont votre intensité de travail, le lieu où vous vous implantez, votre capacité à être un bon vendeur, éventuellement votre savoir-faire technique si cela est nécessaire, et bien sûr la qualité de votre gestion.

C’est pour cela qu’on retrouve tout un tas de cadavres sur le bord de la route de la création : c’est en général parce que les créateurs ne maîtrisaient pas assez le business, étaient mal positionnés, ou ont géré le truc n’importe comment. Mais dans tous les cas, celui qui suit les règles de l’art de son business vivra bien (survivra, a minima) de son travail, et grossira petit à petit, bouche à oreille aidant et portefeuille clients grossissant.

Pour une startup, c’est tout de même différent : on s’attaque à quelque chose qui a priori n’a jamais été fait avant. S’il existe pour plus de 150 business des fiches APCE pour tout savoir de l’entreprise à créer, vous ne trouverez rien sur les projets innovants… on réinvente tout, à chaque fois. (Ce dernier point n’est en réalité pas tout à fait vrai, certaines méthodes de création permettent tout de même de suivre des manières de faire. Mais en aucun cas on ne vous explique les chiffres clés de votre business, ne vous donne de benchmark, ou ne vous liste toutes les étapes de la création.)

C’est bien pour cela, d’ailleurs, qu’il faut convaincre sur autre chose que des chiffres de rentabilité, ou un business-model bien bordé dans tous les sens. Autant pour une sandwicherie on saura combien de centimes de coût matière par sandwich ou quel loyer par m² il ne faut pas dépasser pour espérer s’en sortir, pour une startup, on sait que les chiffres du business plan sont à peu près aussi vrais que les promesses électorales de nos chers élus

Mais comment faire, alors ?

Hé bien, c’est là qu’entre en jeu « LA VISION« . La vision, c’est le cap, l’endroit où veut aller l’entrepreneur, la mission qu’il se donne. La vision, c’est la somme de tout ce que l’entrepreneur a dans les tripes, dans le coeur, et dans le cerveau. C’est ce sur quoi on va pouvoir s’appuyer pour juger d’un projet, car on sait bien que la route est si dure que seule une vision affirmée, forte, ambitieuse… va donner de l’énergie aux équipes pour affronter le chemin.

Alors, certes, cela n’empêche pas que l’on va creuser quand même les chiffres, pas tant pour les vérifier que pour comprendre la réflexion et le raisonnement qui est derrière. Cela n’empêche pas non plus que l’on va tester un peu le bonhomme, après tout c’est une histoire d’humain la création d’entreprise. Cela n’empêche pas non plus qu’on va se montrer intraitable sur la façon d’attirer le chaland. Cela n’empêche pas, enfin, que le produit et la réponse aux besoins du client, devront être validés…

Mais je reste persuadé qu’en plus de l’homme, du business-model, du produit, et de la stratégie commerciale, la vision est le 5ème élément sans lequel le projet manquera de saveur…

Le problème, c’est que la vision demande du recul, du temps, de la réflexion, de la confrontation… autant de choses que l’entrepreneur ne peut que guère s’octroyer, face au compte à rebours de quelques mois (18, 24 maximum ?) qu’ils ont…

Gardez-vous donc du temps pour, régulièrement, respirer et sortir la tête de l’eau, et travailler votre vision. Beaucoup de choses sont plus simples au quotidien, une fois une vision définie !

Et vous, comment vous faites pour construire votre vision ? Vous y parvenez ? Des feedbacks ou anecdotes à raconter ?

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  1. Bonjour,

    Merci pour ce post, très intéressant.

    C’est vrai que la vision est « directrice », et que, même à titre personnel, j’ai depuis quelques années recours à la vision (s’apparenterait-elle à l’exercice de la méditation?) pour « gouverner dans le brouillard ». C’est, en gros, comme un cap à suivre – une boussole bien utile pour un entrepreneur* qui, par nature, se lance dans l’inconnu.

    L’organisation The Natural Step, qui utilise un modèle d’approche stratégique pour le développement durable, considère la vision comme un élément fondateur d’une démarche stratégique « vers la durabilité ». Dans ce cas, pour « faire du développement durable », leur vision intègre une définition de la « durabilité ».

    Les utilisateurs** de cette démarche considèrent que sans se dégager des tendances actuelles (forecast / forecasting), on ne peut pas produire de l’innovation de rupture. Une vision permet de « jeter un pont dans le futur ». En effet, « commencer avec la fin en tête » (backcasting) permet de créer une tension créative permettant d’aller dans le bon sens.

    Selon les utilisateurs de la démarche, il y a deux manières de faire:

    – Le « backcasting avec scénario »: On imagine une image du futur, à l’instar des cabinets d’architecte qui produisent des maquettes ou vidéo en image de synthèse pour montrer ce que donnerait un projet.

    – Le « backcasting avec des principes »: On a recours à des « guidelines » ou directives qui favoriseront, dans le long terme, les chances d’intégrer notre activité à un paysage social, économique et environnemental renouvelé.

    Si vous souhaitez connaître des techniques de « visioning » à mettre en place pour des workshops, n’hésitez pas à me contacter. Merci!

    *Ou un groupe de partenaires d’affaire souhaitant poser un cadre inspirant pour « discipliner » leurs actions tout en restant créatif, et se sentir libre (… »libre » de « respecter » leur vision).
    *** La démarche The Natural Step (TNS) vise à rendre les organisations plus stratégiques dans leur souhait de contribuer au développement durable, et notamment informer les décisions pour être plus efficace, efficient et maximiser les bénéfices à court terme comme sur le long terme. Elle a été mise en oeuvre, par exemple, dans des organisations internationales telles que Electrolux, Volvo, Max Burgers, McDonalds, Ikea, Nike, Interface Inc., Hydro Polymers Ltd., et bien d’autres entreprises, associations ou communautés, de toute activité et de toute taille.

  2. Régulièrement, nous organisons un point « vision » avec les associés pour faire le point sur ce que l’on cherche à démontrer, à réaliser… ou à changer dans l’économie actuelle. Je me souviens d’une session du Tremplin où l’intervenant nous expliquait qu’il fallait Expliquer et Rassurer le client (ou l’investisseur), mais qu’il ne fallait pas oublier de le faire Rêver. Selon moi, c’est à cela que sert la vision : imprimer une vision prospective, qui fait partie intégrante du « story telling » de la boîte…

  3. Merci pour cet article qui effectivement rappelle que sans la vision on ne peut avancer.
    Par contre, toute la difficulté résulte dans le fait d’adopter les bonnes méthodes pour maintenir cette vision et comprendre les évolutions, les tendances…
    En interne, nous utilisons le design thinking pour nous obliger à observer tout en étant pragmatique grâce à l’expérience utilisateur.
    Mais je rejoins Vincent BARAT, l’entrepreneur son métier c’est de voir, de convaincre, de rassurer, d’animer, de fédérer pour que son entreprise rayonne.
    En fait, pour être un bon entrepreneur à mon humble avis, il faut apprendre en permanence et s’ouvrir pour intégrer un maximum d’outils et pour devenir une boîte à outils géante qui permet de faire face aux difficultés et d’accroître sa résilience.

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